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The storyteller cat
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21 septembre 2012

Le goût des cerises P2

Le goût des cerises (Partie 2)

Je sens qu'on me chatouille l'oreille et m'embrasse dans le cou mais je garde les yeux fermés et je continue à me rappeler mon enfance.

Je me rappelle que ma mère protestait lorsque j'étais dans l'arbre. Elle n'y faisait pas allusion mais je devinais qu'elle pensait à la triste fin de mon père et qu'elle craignait qu'il ne m'arrive la même chose. Cependant, je ne l'écoutais plus. J'avais fini par ne plus lui adresser la parole, à elle non plus, si bien qu'elle pensait que j'étais devenu irrémédiablement muet. Elle avait bien tenté d'appeler un médecin même si celui-ci s'obstinait à répéter à ma mère que c'était dû au traumatisme que j'avais vécu et que tant que je serais bon à l'école, il n'y aurait pas de raison de s'inquiéter. Bon à l'école, je l'étais, il est vrai, même si je ne ramenais que des zéros lorsque je refusais de réciter mes poésies. Pourtant, je n'étais pas muet. J'estimais juste que seule une personne qui me comprendrait mériterait de converser avec moi. Pour le moment, mon seul confident s'avérait être le cerisier.

Parfois, je repoussais encore des jeunes voleur de fruits et même si ça m'a souvent couté des bleus, j'étais fier de faire fuir ces êtres que j'estimais mauvais.

J'avais maintenant dix ans. Ma mère avait abandonné tout espoir que je reparle un jour et passait de longues journées à médire sur son sort. Pour ma part, je passais mes  journées d'été dans l'arbre et petit à petit, je m'installais davantage à l'intérieur des branchages. Toujours plus profondément, toujours plus haut. Les oiseaux restaient lorsque je m'approchais de leur nid. Les insectes ne me faisaient pas peur. J'étais moi-même une partie de l'arbre.

Les baisers ont laissé la place à des petites secousses. On tente de me réveiller. Mais ce n'est pas encore le moment. Je me rappelle toujours. Je veux encore pouvoir me souvenir.

On était vers la moitié de l'été, ce jour là. J'avais décidé grimper toujours plus haut dans le cerisier. Je voulais atteindre le sommet. Alors je m'étais concentré, avait cueilli quelques cerises que je m'étais empressé d'avaler et j'avais commencé mon ascension. Plus je montais, plus je me sentais libre et finalement, toute peur s'éloigna. Par excès de confiance, je grimpais beaucoup trop vite, sans me soucier d'avoir de bons appuis et c'est lorsque j'ai senti que mon pied gauche tentais de prendre appui dans le vide que j'ai réalisé. J'étais en train de chuter. J'ai bien tenté de me rattraper mais je n'ai réussi qu'à m'égratigner les mains et les bras et mon dos toucha le sol. Je pense être resté un moment les yeux fermés à tenter de reprendre ma respiration, allongé ainsi sous l'arbre puis j'ai cru entendre marcher dans ma direction.
« Ma mère va me tuer », pensais-je.
Mais la personne qui s'était avancée ne semblait pas être elle. Encore sonné, j'essayais d'accentuer mon ouïe pour deviner ce que faisait la présence et je senti une brindille caresser mon oreille. La sensation de chatouille qui s'ensuivit me força à ouvrir les yeux et à me redresser. Assis dans l'herbe, je contemplais la plus jolie fille que j'avais vu. Dans sa main droite, elle tenait la brindille qui m'avait chatouillé juste avant et elle me souriait.
-J'ai cru que tu étais mort. Me dit-elle. Tu es tombée de très haut, tu sais? Tu vas bien?

En silence, je me suis relevé et me suis installé dans les premières branches de l'arbre. J'espérais que la fille parte si je l'ignorais mais elle ne semblait pas déterminer à s'en aller.
-C'est chez toi, ici? C'est ton arbre? Je peux monter? Demanda t-elle.

Et avant même que je puisse réagir, elle s'asseyait à côté de moi, dans mon arbre.

Je crois qu'elle a dû percevoir que j'allais lui commander de descendre de là mais avant que j'ouvre la bouche, elle y avait posé son index pour me faire taire. Elle s'est alors blottie contre moi et je n'ai rien fait pour l'en empêcher.

Plus tard, j'appris qu'elle s'appelait Caroline et qu'elle venait d'emménager avec son père à cinq-cent mètres de chez moi. Elle ne parla pas de sa mère et je ne lui posais pas de question dans ce sens non plus. En fait, je ne voulais pas qu'elle évoque mon père.

Caroline et moi sommes rapidement devenus inséparables. Elle était la seule à qui je parlais et la seule qui avait le droit de grimper dans l'arbre avec moi. Je lui avais même raconté, pour mon père. Parfois, elle s'endormait contre moi sur les branches et je devais la réveiller doucement pour qu'elle puisse rentrer chez elle. Je ne sais pas si c'était mon imagination ou non mais il semblait parfois qu'elle faisait semblant de dormir et j'en avais déduit qu'elle ne devais pas vraiment aimer rentrer chez elle.

Peut-être qu'elle ne se plaisait pas là-bas. Ou peut-être que j'étais son seul ami. En tout cas, le jour de mon anniversaire, elle insista pour rester dormir avec moi dans l'arbre et le lendemain, elle ne revint pas.

Les secousses se font plus insistantes. On ne veut vraiment pas me laisser dormir.

Ce fut le surlendemain que Caroline revint jouer avec moi. J'étais content de la voir arriver et je voulais la taquiner sur son absence de la veille quand je me suis aperçu qu'elle boitait légèrement. Lorsque je l'avais questionné à ce sujet, mon amie avait répondu d'un air évasif qu'elle s'était cogné contre un meuble et qu'elle n'avait pas pu bouger jusqu'à aujourd'hui, cependant, je cru l'entendre murmurer, comme pour elle-même, quelque chose comme « il n'aime vraiment pas que je passe la nuit dehors ».

Avec Caroline, l'été est passé à une allure folle et l'entrée au collège approchait à grand pas. J'étais triste parce qu'elle et moi, nous n'allions pas dans le même collège mais nous nous étions promis de continuer à se voir les week-ends et pendant les vacances.

Le dernier jour des vacances, Caroline m'avait rejoint dans l'arbre. Il me semblait qu'elle boitait encore un peu mais elle ne raconta rien à ce sujet. La journée passa comme toutes les autres mais au moment de partir, elle se tourna rapidement vers moi et m'embrassa. Puis elle sorti un petit canif de sa poche et entreprit, avec mon autorisation, de graver quelque chose sur le tronc.

Cette fois les secousses se font bien plus fortes encore et je finis par ouvrir les yeux, un peu déçu d'avoir finalement abandonné mes souvenirs.
-Ah? Tu es finalement réveillé? Tu sais qu'il est déjà dix heures du matin? J'ai eu un mal fou à te réveiller. Me dit alors la femme qui m'avait secoué.
-Bonjour toi, répondis-je. J'étais en train de rêver.
Puis nous nous sommes embrassés quelques secondes avant que la femme ne s'agite soudainement.
-On va être en retard! Habille-toi vite! Mes parents nous attendent. Ils faut qu'on finisse de tout organiser ce soir. S'écria t-elle.
-C'est bon, Gwen'. On a encore le temps, après. Dis-je.
-Encore le temps? S'offusqua Gwendoline. Il faut bien tout préparer à l'avance. Je veux que tout soit parfaitement au point pour notre mariage.

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Commentaires
H
^.^ j'adore
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